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• Samāpatti 2

L’article précédent (Samāpatti 1), correspondait au sūtra I.41, issu du livre I, le versant théorique des yogasūtra. Il montrait la samāpatti : se laisser colorer par l’objet de désir. Il était dit que ce phénomène de coloration est le mode de samādhi, l’état connaissant, le but des pratiques de yoga.

Mais vous l’aurez certainement remarqué, dans la confluence, un fleuve absorbe une rivière qui perds son intégrité, son identité, peut-être son existence même. Le risque de la fusion est de se trouver absorbé et de disparaître de façon symbolique et psychopathologique voir de bel et bien mourir. C’est pour cela que les anciens comparent le yogi à un cristal dont la structure n’est pas modifiée par la rencontre avec ce sur quoi il repose, seule la couleur de l’objet traverse et empli la matière cristalline sans l’altérer.

Toute la démarche de connaissance et du yoga est résumable en discernement : comment se laisser colorer sans être déstructuré par la fusion ? C’est l’objet du livre II de décrire les moyens de résoudre cette équation, de vivre ce paradoxe apparent.

Au cœur du livre II, toute la démarche des pratiques de yoga est synthétisée en 34 sūtra intitulés aṣṭāṅgayoga (les huit membres du yoga). Il se trouve que le centre de cet aṣṭāṅgayoga coïncide avec le centre des 194 sūtra qui sont, rappelons-le déjà une synthèse de bien des enseignements plus anciens.

Au centre, il y a ceci :

YS II.46  sthirasukham āsanam
Ferme  et heureuse l’assise (āsana),

YS II.47  prayatnaśaithilyānantasamāpattibhyām
par relâche de l’effort et infinie samāpatti ;

YS II.48  tato dvandvānabhighātaḥ
de là, la non-destruction par les couples d’opposés (dvandva).

Au centre de la pratique, il y a l'assise et il y a relâche de l’effort entrepris jusqu’alors. Relâche du contrôle des cittavṛtti évoqué dès le début de l’enseignement (YS I.2). Comme lors de l’apprentissage d’un instrument de musique, l’effort de contrôle du début laisse place à la maîtrise. Comme lorsque le musicien, après de nombreuses répétitions, vit tout simplement l’harmonie présente. La maîtrise apparaît d’elle-même, par relâche de l’effort et en se laissant infiniment colorer.

En deçà de l’assise l’enseignement montrait ce qu’est la maîtrise (yama) et comment nos limitations (niyama) peuvent être modifiées. L’enseignement était alors fait d’ardeur (tapas), d’étude (svādhyāya) et de remettre le fruit de ses actes à plus grand que soi (īśvarapraṇidhāna), une façon de cultiver courage et détachement !

Dès lors que nous sommes assis, c’est l’espace de méditation qui est en place et en une fraction de seconde, pour qui sait être sans attente ni impatience, la samāpatti est déjà là, samādhi est déjà l’état vécu. La véritable pratique méditative nommée samyama (totale-maîtrise) est en place.


Étymologie :

Sam-ā-PAD

PAD : aller - ā : intensément - sam : totalité
Aller (PAD) - intensément et en rapport au sujet (ā) – jusqu’à s’assembler totalement (sam)
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